Souvenirs par F Macy

Souvenirs

La maison de famille, nichée dans les bois, avait accueilli toutes les générations depuis cent ans. Des ifs aux branches tordues, bordent l’allée.

Ici, les souvenirs s’entremêlent, les entre-lacs forment les chemins de vie de chacun. Il y eut des joies, des peines, des enfants qui pleuraient, des parents qui séchaient leurs larmes.

Stella, assise dos au mur de la vieille longère, se laissa aller, ferma les yeux, les images affluèrent, nettes, précises. Voilà sa grand-mère, en costume breton, sa plus belle coiffe dissimule ses cheveux blancs, elle étend le linge au soleil, près du platane planté par son aïeul. Les enfants courent et se roulent dans l’herbe, les chiens mordent dans de vieux os déterrés.

La paix baigne tant dans ce tableau que Stella voudrait le peindre pour ne pas le perdre. Elle voit la toile : Sa mère étire le fil sur la quenouille, au coin de la cheminée, où l’on a allumé le feu. Dehors, près de l’auge, la tante plume la poule qui sera le repas du midi. Elle entend son père surtout, il est dans son atelier. Il rabote, pointe, remue les outils, le son du chalumeau qui crache du feu bleu, comme elle disait, la ravit toujours autant.

Toute la vie de son enfance passe devant les yeux de Stella comme un kaléidoscope, c’est un arc-en-ciel de souvenirs. Bien sûr, il y eut des blessures, la guerre, la perte des êtres chers au fil des ans.

A présent, la maison est abandonnée, la horde familiale l’a désertée. Elle va bientôt être détruite, finir en tas de pierres, comme une verrue au milieu du champ.

Comment ranimer la flamme du temps passé ? Peut-on broder les récits de vie de chacun ? La terre va-t-elle garder la mémoire de ceux qui ont vécu là ? Ecrire pour ne pas oublier, générer à nouveau les émotions. Coudre les fils de vie pour les relier un à un, en faire une toile d’araignées, ne pas se priver de la richesse de nos ancêtres.

Stella se leva, secoua la tête pour sortir du rêve et marcha lentement. Elle grimpa le petit sentier vers l’allée d’ifs qui ont tant grandi.

«  Un petit morceau d’une branche morte tomba sur sa robe, elle leva les yeux, il venait du platane. Elle s’approcha du gros arbre à la peau lisse et pâle, et le caressa comme une bête. Son pied heurta dans l’herbe, un morceau de bois pourri ; c’était le dernier fragment du banc où elle s’était assise si souvent avec tous les siens »

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