Limitation de vitesse de Tête de Poireau

Limitation de vitesse
Ils roulaient. Ils avaient décidé de partir, de se changer les idées.
Lui, fenêtre ouverte, sifflotant, l’idée de ce voyage le ravissait.
Elle, les pieds sur le plateau de bord, lézardait au soleil.
Elle aimait se faire véhiculer. Elle en profitait pour rêver. Elle adorait ce temps suspendu, elle, qui
dans la vie de tous les jours ne savait pas se poser. Elle prenait un bon bouquin , un polar de
préférence et se jetait tête baissée dans l’intrigue.
Lui, aimait rouler sans s’arrêter, au risque de ne pas respecter les recommandations de la sécurité
routière. Il roulait à gorge déployée. S’arrêter était pour lui une perte de temps.
Elle, parce qu’elle ne voulait pas d’histoires, utilisait toujours le même subterfuge. Quand elle
considérait qu’il fallait faire une pause, elle prétextait une envie pressante, même si celle ci n’était
pas si pressante.
Lui, aimait rouler vite. Il aurait pu être pilote de course tant il adorait la vitesse. Il se sentait libre
dans cet excès.
Elle, de temps en temps, s’échappait de son énigme policière et jetait un coup d’oeil discret au
tableau de bord.
Lui, ne la voyait pas, mais il savait qu’elle le surveillait. Il était très vigilant, lui aussi ne voulait pas
d’histoires. Vitesse limité à 100 km/heure, il oscillait entre 99,99 et 101. Il était malin.
Elle, quand elle zyeutait le cadran, elle était rassurée.
Lui, devait rester concentré pour garder le rythme.
Elle, quand elle se sentait en sécurité, relâchait sa vigilance. Elle aimait ce moment où elle lâchait
prise, où elle partait dans une douce somnolence.
Lui, repérait les indices : tête qui se laisse aller sur le côté, livre qui s’échappe des mains .
Alors, il quittait son trop paisible : 100/ 99,99/ 101. Il redevenait libre comme l’air. Il s’imaginait au
volant de son bolide supersonique. Il passait le mur du son. Il était comme transcendé.
Elle, comme si trop de vitesse l’avait sortie de son rêve, comme si dame vigilance lui avait chuchoté
à l’oreille : « réveille toi » Elle, revenait à la réalité.
Lui, savait quand la récréation était terminée. Il guettait les indices : son corps allait s’étirer, son
polar reprendrait sa place, un sourire poindrait sur son visage, discrètement elle regarderait les
chiffres qui s’affichent.
A ce moment précis, il faudrait impérativement que le compteur indique le fameux trio possible :
100 /99,99/ 101.
Ainsi se passait leur voyage entre bienveillance, sourires et attentions. Ils étaient heureux.
« Vos papiers, s’il vous plaît, Monsieur »
Elle, interrogative, surprise.
Lui, blafard, tremblant.
« Nous avez été flashé à 200km /heure »
Ils savaient tous les deux que leur beau week-end en amoureux prenait fin à cet instant là.

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