Je hais la distance et ça depuis mon enfance. Ce sentiment qu’elle me procure est terrible. Il m’envahit le corps comme des petits frisottis. À l’âge de 14 ans, j’ai vu partir mon frère pour ses études à plus de 8 000 km. La distance nous transforme et l’un de ces pires symptômes est si difficile à combattre : le manque. Même si on finit par apprendre simplement à vivre. Cette séparation engendre aussi des retrouvailles : cette joie et cette excitation qui nous transperce, un bonheur à l’état pur.
Une distance est un vide et ce vide face au monde est tout aussi terrible. En effet, en Afrique vivre à distance est un luxe. Malheureusement, le contact est omniprésent à cause d’un seuil de pauvreté très élevé. Ils vivent donc tous les uns sur les autres. Chaque personne sur Terre n’est certainement pas consciente de cet écart entre chacune de ces vies que nous menons tous aux quatre coins du monde. De nombreux individus aiment que l’on respecte leur espace vital. D’autres, imaginent leurs vacances aussi loin que possible de leur domicile. Dans un autre monde, cette chance n’est parfois pas possible.
Il existe aussi une distance entre l’objectif que nous nous fixons dans la vie et les moyens pour pouvoir l’atteindre. « Tous les Hommes pensent que le bonheur se trouve au sommet de la montagne. Alors qu’il réside dans la façon de la gravir ». Il faut faire un pas après l’autre. Tous les jours, il y a un nouveau commencement. Toute porte de sortie est une porte d’entrée sur autre chose. Avant de vouloir regarder plus loin, il faut d’abord regarder en arrière pour se rappeler d’où l’on vient, réaliser le chemin parcouru. Le trajet laisse une trace indélébile.
Une séparation déclenche le syndrome de l’abandon. Un état psychologique dans lequel l’insécurité est permanente. Il est lié à une peur irrationnelle d’être abandonné. J’ai toujours repoussé les gens, pour me sentir davantage en sécurité. Toutefois, ça ne m’empêche pas de me sentir moins abandonnée. Au contraire, je déteste la solitude. Me sentir ou me retrouver seule me tétanise, alors avoir passé 55 jours face à moi-même était un combat. Je suis toujours à distance avec moi-même. Quand je me regarde dans un miroir, je fais constamment un pas en arrière. Je n’aime pas ce que je vois, alors je fuis. À ma grande surprise, cela m’a appris que s’aimer soi-même était le début d’une histoire d’amour qui durera toute une vie. Parce qu’il n’y qu’une personne avec qui on va passer toute notre vie, c’est nous même.
Parfois prendre de la distance avec soi, les autres, ou les évènements est subjectif, et ne se calcule pas « à vol d’oiseau ».